Membres

samedi 10 avril 2010

Quatrième épisode


Scène sept


Deux autres chasseurs et un FK12 avaient réussi à regagner Arche 12. Mon F54b était très endommagé. Celui de Ktanm l’était moins même après sa glissade. J’avais demandé à l’équipe de maintenance de récupérer les pièces de mon chasseur pour refaire celui de Ktanm. Cette base comme toute les bases de maintenance portait le nom de Arche suivi d’un numéro. Elle venait d’être mise en service et aurait dû recevoir les vaisseaux techniques comme les nettoyeurs ou les ravitailleurs. En raison des retards, elle était presque vide. C’était la seule explication à l’absence de bombardement. Les véhicules terrestres étaient partis explorer la planète. A chaque retour, nous avions droit au même compte rendu : disparu sous les bombes. Les savants des Marges orientales maîtrisaient parfaitement la fusion. Leurs bombes à fusion ne laissaient quasiment aucun résidu radioactif. Les sites étaient propres prêts à être colonisés.
Comentick, le colonel dirigeant Arche 12, s’attendait chaque jour à voir débarquer les margiens. Les jours passaient sans qu’ils ne reviennent. Le colonel ne comprenait ce qu’ils attendaient, lui aurait profité de sa victoire pour assurer une solide tête de pont. Il avait mis la base en alerte. Il y avait eu d'ailleurs un branle-bas de combat quand les grandes oreilles qu'étaient les transmetteurs, avaient signalé de curieuses émissions venant de la région de l'espace proche du TET de Epsilon850. Cela avait duré quelques heures et tout avait cessé. Le colonel et les transmetteurs se repassaient les enregistrements. Avec la rotation de la planète, ils n'en avaient que les échos renvoyés par les satellites avant de les recevoir en direct.
- Cela ressemble aux procédures de l'Empire mais les codes sont différents.
- Vous pouvez décoder?
- Non, Colonel. Notre base n'est pas habilitée à recevoir les transmissions hors planète en clair. 
- Comment savoir? Ennemis ou amis?
- On ne peut pas savoir. Les radars montrent une trace de vaisseau devant le TET d'Epsilon 850. Mais comme pour le reste nous n'avons pas l'équipement pour savoir. Il aurait fallu faire décoller un chasseur au risque de nous faire repérer.
- Trop dangereux ! Nous allons continuer à fonctionner en huis clos. Si tout va bien, les vaisseaux de secours ne vont pas tarder. Ils auront les codes pour nous joindre.
Je comprenais le colonel. Il disposait de techniciens en grand nombre, mais pas suffisamment de soldats. L’effectif de son armée volante se comptait sur les doigts d'une seule main avec quatre chasseurs dont un ne pourrait pas être réparé et un FK12.  Toutes les communications avec le reste du système d'Endoor avaient cessé. S'il y avait des survivants, nous ne pouvions ni les joindre ni les secourir et encore moins en attendre du secours.
Je n’avais rien à faire. Je traînais mon ennui et ma peine dans le hangar trop vaste où nos chasseurs étaient parqués. Je tarabustais les techniciens pour qu’ils réparent au plus vite le F54b de Ktanm. J’en profitais pour y faire apporter quelques modifications. Je voulais des canons à obus colorants. Je voulais aussi qu’ils m’installent une radio à ultra-ondes. Ce n’était pas dans les protocoles. Si bien qu’ils se firent tirer l’oreille. Ils cédèrent pourtant devant mon insistance et leur propre ennui. Trouver comment monter ce bazar dans un F54b, les occupa toute une journée.
Quand le jour revient le chasseur était prêt. J’obtins du Colonel le droit d’aller faire des essais. Les autres pilotes étaient encore incapables de reprendre les commandes. Nous mîmes au point un protocole d’échange radio. Nous étions à la troisième heure du dixième jour après les combats. Tenkiu  m’avait dit en aparté que lui et ses copains s’étaient lâchés sur la machine. Les moteurs n’étaient plus ceux d’origine mais des pièces de Z45, pas plus gros, mais quatre fois plus puissants. Les radars et autres générateurs de champs avaient aussi été changés.
- Je crois qu’on s’est laissé entraîné, me dit-il. Jamais nous n’avons bricolé comme cela un vaisseau. Le plus curieux, c’est que tout semble s’entendre.
J’étais impatient de l’essayer. Le décollage me laissa abasourdi. Je sentais à la fois la poussée extraordinaire de la machine et je ne m’écrasais pas. Un nouveau générateur de champ pilote gérait les G. Avec de tels équipements, j’eus un sentiment de toute puissance. Une larme coula, puis une autre. Je pensais que si Ktanm avait eu ce chasseur transformé, elle serait encore là. Je m’éloignais de la troisième planète. Mon plan de vol prévoyait que je fasse le tour d’une des lunes, puis que je croise l’orbite de la quatrième planète et que je rentre. Mes pensées allèrent vers Ktanm pendant que je filais vers la lune 3D. Elle était la seule victime que nous ayons sur la base d’Arche 12. Son inhumation nous avait permis de rendre hommage à tous les morts de cette bataille perdue. Sa tombe regardait vers le soleil levant selon le protocole en usage sur Simpalaa. Les yeux embués, je déclenchais les enregistreurs à courte et longue portée. Le but était de savoir s’il y avait d’autres survivants.
Je me concentrais sur le pilotage. Il y avait toujours beaucoup de débris au loin. Les champs de protection et de défense semblaient doués d’une vie propre. Ils se mettaient en route et se coupaient seuls en fonction des données des différents capteurs radars. Les moteurs non seulement étaient plus puissants mais ils consommaient moins d’énergie. Les techniciens avaient bien travaillé. A croire qu’il avait rendu ce F54b intelligent. Je pénétrais dans un nuage de débris de toutes sortes. Les radars et les champs de protection réagissaient à la perfection. Encore une nouveauté, si je tournais mon regard vers un objet, une bulle d’info me donnait tout ce que je voulais savoir. Je sursautais, cela voulait dire que même les ultra-ondes fonctionnaient en plein vol et que j’avais accès au RésOrd. 
Ayant contourné la lune 3D, je remis la puissance. De nouveau la sensation d’accélération fut jouissive. Je filais vers l’orbite de la quatrième planète. Je serais à portée d’enregistreur dans quelques minutes. Le colonel allait être content. J’aurais des informations précises sur ce qui restait sur la quatrième planète. Je me concentrais sur ma tache. Encore quelques secondes…
Le F54b décrocha brutalement sur tribord. Sans le générateur anti G, j’aurais été réduit en bouillie sanguinolente dans mon cockpit. Le tir du disrupteur me rata de peu, mais il me rata. Un disrupteur ici dans le système d’Endoor, je n’en revenais pas. L’énorme vaisseau, un des quatre que possédaient l’Empire, venait de surgir du TET72 près de l’orbite de la quatrième planète. On les appelait des disrupteurs en raison de leur armement particulier. Contrairement aux lasers qui détruisaient leur cible en lui transférant plus d’énergie que ce qu’elle pouvait absorber, les disrupteurs annihilaient tout, y compris l’espace-temps. Son deuxième tir n’eut pas plus d’efficacité, mon chasseur avait quitté la ligne de tir juste avant son déclenchement. Je cherchais un TET à proximité quand une entrée s’ouvrit devant moi. Je rejaillis sur la face cachée d’une lune de la quatrième planète. Je me dis que j’avais de la chance, tellement de chance que ce n’était pas normal. J’étais un excellent pilote mais ce que je venais de faire confinait au génie du pilotage. Ktanm en aurait été capable, pas moi.
- Ktanm ?
- Il t’a fallu du temps Right !
- Ktanm !!!!! Mais tu es où ?
- Là où j’ai toujours rêvé d’être. Je suis le Chasseur. Ce que tu as enterré n’est qu’une enveloppe vide. En Ecotrois, j’ai achevé mon initiation commencée sur Simpalaa. Mon Maître avait raison. Même cela nous est possible.
- Que va-t-on faire avec le disrupteur ?
- Je m’en occupe. Son pilote est Simpalais aussi. C’est un initié de niveau huit. Je sais comment lui dire qui nous sommes. Par contre Right, jure-moi de ne jamais révéler ce que tu viens d’entendre. Ce serait ma mort, la vraie.
- Je te le jure Ktanm.
- Alors, allons-y !
Le chasseur fit un bond en avant. Elle avait des champs de camouflage. Le disrupteur ne nous détecta pas. Ktanm se positionna devant l’œil de la caméra du pilote avant de se faire reconnaître. Il eut un grésillement dans la radio et une voix étouffée murmura. 
- Maître Ktanm, ça suffit! Je te donne les codes de reconnaissance.
J’entendis la télétransmission des données de reconnaissance. Apparut devant mes yeux, la silhouette d’un capitaine.
- Vous êtes autorisé à aborder sur le pont 4, entrée 12. Donnez identification vocale.
- Ici lieutenant Right, commandant de la base de la lune Alpha, réfugié sur la base Arche 12 après les combats.
- Bien reçu. Dès que vous aurez été arrimé, l’amiral vous recevra.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire