Deuxième scène
J’exultais.
Derrière moi deux escadrilles de F55 flambant neuf, s’étaient mises en formation pour atterrir.
L’Empereur m’avait donné le grade de colonel et le commandement de cette nouvelle unité de reconnaissance et d’action. Les usines avaient travaillé jour et nuit pour livrer ses nouvelles machines en temps et en heure. Moins anguleux que le F54b, le F55 en reprenait l’architecture. Les pilotes déjà confirmés sur F54b pouvaient ainsi être qualifiés très vite sur F55. Voler sous les ordres de celui qui danse la mort était devenu le rêve de beaucoup de pilotes. Les candidatures avaient été très nombreuses, trop nombreuses. Mon séjour sur Terre Un fut en grande partie rempli par ces sélections. Pour les cinquante places possibles, il me fallut choisir entre mille pilotes. Sans l’aide de Ktanm, je n’y serais jamais arrivé. La présélection fut faite par les instructeurs. Le test final était de voler en binôme avec moi. Ktanm avait une idée précise de qui était bon et mauvais pilote. Les recalés trouvèrent les critères de sélection flous. Personne n’osa discuter ouvertement mes choix éclairés par Ktanm. Mes visites chez l’Empereur décourageaient toute critique. Il nous faisait venir régulièrement pour voler avec Ktanm. Je jalousais cette complicité bien plus ancienne. Ktanm ne voulait rien dire. Je n’osais pas interroger l’Empereur.
Quand les deux escadrilles furent prêtes, l’Empereur nous fit une visite. Son déplacement sur la base lunaire fut un évènement galactique. Il ne sortait quasiment jamais de son palais. Les médias s’interrogèrent longuement sur cette visite. Chacun y alla de son commentaire. L’opinion publique de nouveau se focalisa sur moi. Ceux qui se prenaient pour les mieux informés, émirent l’idée d’un plan tellement secret que seul l’Empereur et moi le connaîtrions. D’autres parlèrent de tocade pour un spadassin peut-être génial mais qui ne pourrait que décevoir dans les temps à venir. Ils firent même des paris sur la durée de vie du phénomène. Je fus étonné de voir s’embuer le regard de l’Empereur faisant ses adieux à Ktanm. Celle-ci resta silencieuse longtemps après notre départ.
Nos ordres contrairement à la rumeur, étaient simples. Notre faiblesse était de ne pas connaître le terrain où nous combattions. Nous devions faire une cartographie des TET des Marges Orientales et autant que possible frapper leurs flottes. Nous ne devions pas engager de bataille rangée mais opérer par raids et escarmouches. Pendant que nous accomplissions notre mission, une nouvelle armée se réunissait dans le système d’Endoor. Muni de nos renseignements, l’Empereur ne doutait pas de sa victoire.
Nous allions être basés sur un astéroïde perdu dans un système improbable. Ktanm et moi avions découvert ce système par hasard, lors d’une reconnaissance. Pour préparer notre implantation, nous avions circulé sans autre but précis que de rester à proximité des Marges Orientales. A notre sortie du TET, nous avions failli griller. Les réflexes de Ktanm, nous sauvèrent la vie. L’étoile mourait. Son expansion était commencée. Elle englobait déjà le centre du système. S’il y avait eu des planètes, elles avaient disparu dans le brasier. Les TET intérieurs étaient devenus des pièges mortels débouchant au cœur de la fusion stellaire. Nous avions débouché à la limite du tolérable. Après avoir pris une distance de sécurité, j’avais analysé l’équilibre du système. La ceinture d’astéroïdes ne serait pas atteinte avant trois ou cinq années locales. Cela nous laissait largement le temps de mener à bien notre mission. Par contre pas un vaisseau hormis les F55 ne pourrait virer assez court à la sortie du TET pour éviter le feu de l’étoile expansive. Nous avions exploré les autres TET plus lointains. La marge de sécurité avant une possible attaque faisait de la ceinture d’astéroïdes une forteresse naturelle. Aucun gros vaisseau ne pourrait s’aventurer sans risque dans cette zone, quand aux éventuels chasseurs ou petits bombardiers ennemis nous n’aurions aucun mal à en venir à bout.
La construction de la base fut un défi technologique. Pour acheminer le matériel sur l’astéroïde que nous avions surnommé Double Huit, en raison de sa forme, nous avions inventé un système de remorque pour les chasseurs. Le virage de sortie du TET était un challenge potentiellement mortel, avec les F55 en limite de surcharge. Par bonheur, il n’y eut que deux pertes à déplorer, rapidement comblées par les candidats qui se pressaient toujours pour faire partie des escadrilles qui dansent la mort.
Un personnel de maintenance réduit, pas ou peu de matériel sur place, étaient les caractéristiques de la base du Double Huit. La défense était assurée par quatre chasseurs en vol. L’astéroïde était devenu comme un vaisseau mère, servant au ravitaillement entre deux missions. Un roulement était prévu avec une troisième escadrille qui arriverait dès que le F55 seraient prêts.
Je me posais en premier. J’allais vers un des sas en pensant que les choses sérieuses allaient commencer dès le lendemain. Je pensais tout haut :
- Ce sera la gloire ou la mort !
- Et comme je n’ai pas envie de mourir…
La voix de Ktanm me fit sourire, l’avenir était à nous.
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